En janvier dernier, j’ai eu la chance de me rendre dans les coulisses du défilé de Stéphane Rolland. Comme vous le savez depuis que nous avons rencontré le couturier il y a 1 an maintenant, nous ne nous lassons pas de vous montrer ô combien ses créations sont exceptionnelles.
Pour cette occasion, je me suis lancé un défi : couvrir les backstages avec un argentique. Pour les plus jeunes, l’argentique est l’ancêtre du numérique, une simple pellicule qui imprime la lumière captée, le principe même de la photographie.
Chargé de mon énorme numérique et de mon minuscule argentique, j’ai arpenté les allées de la salle de maquillage et de coiffure. C’est ici que je me sens le mieux, au plus près des modèles, où je peux sentir leur ennui, leur agacement, leur tristesse. Pour reprendre les mots de Robert Capa « si ta photo n’est pas assez bonne c’est que tu es trop loin » : c’est exactement ce qui résonne en moi en ce moment, je veux être au plus près de celle à qui je dérobe l’image.
Avec l’argentique réside un problème de temporalité, il est impossible de savoir si votre photo est réussie, vous devez vous faire confiance et accepter de rater des clichés au risque de n’avoir comme souvenir que l’intention du moment passé.
J’ai donc appuyer 36 fois sur le déclencheur, fébrilement, esquissant un sourire gêné de ne pouvoir montrer aux mannequins le résultat immédiat. Sorti de mon enfer personnel, une fois le défilé terminé, je n’ai eu qu’une seule hâte : cacher cette fichue pellicule ! Ne jamais voir l’étendue de mon échec. Je préfère le fantasme d’une réussite au rugueux contact de l’échec.
Mais vint un jour où l’évidence devient omniprésente voire insoutenable : il me faut développer et enfin assumer. Je file donc chez Négatif +, dépose mon sac de pellicule et m’entends dire « Revenez demain pour vos photos ». Quoi demain ? Pas dans une semaine, c’est trop court, je ne suis pas prêt ! Mon angoisse monte d’un cran. 24h plus tard je pousse la porte de la rue Lafayette, paye mon dû (c’est tout de même très cher tout ça) et pose le tout sur le siège de mon scooter.
Je crois que mon âme d’enfant est passée aux commandes le temps d’ouvrir cet ultime cadeau de Noël. Les photos en grande majorité sont nettes, le contraste est saisissant, les noirs sont profonds et les blancs intenses. Les émotions sont plus fortes en argentique, comme si l’intention de la photo parfaite s’imprimait sur la pellicule, comme si mes craintes avaient sublimé mes photos… !
Et dire que j’ai délaissé la photo argentique pendant presque 10 ans ! Je pense que le chemin old school sera le mien dans les mois à venir… Qu’en pensez vous ?